vendredi 11 septembre 2015

Le Triangle des Bermudes Part 2 : de 1900 à 1950

Le Triangle des Bermudes Part 2 : de 1900 à 1950 - 2012 - up 09-2015

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Epave du Sapona, échoué dans les années 30, suite à une tempête sur l'îlot Cat Key, au large de Bimini, Bahamas. Encore visible de nos jours.


Suite de la Partie 1


On aurait pu penser qu’avec les progrès techniques, l’endroit allait rejoindre la moyenne mondiale en terme de naufrages ou disparitions, mais il n’en a rien été, au contraire : aussi bien les navires à vapeur que les avions et les sous-marins, malgré leurs moteurs plus puissants et leurs équipements de plus en plus sophistiqués continuent a essuyer de lourdes pertes comme en témoignent les nombreux drames qui se multiplient.

L'un des premiers navires qui fit parler de lui au début du 20ième siècle fut le Freya, qui fit notamment l'objet d'un article dans la célèbre revue Nature publié le 25 avril 1907. Ce navire n'est pas en principe rattaché au Triangle des Bermudes puisqu'il a été en fait retrouvé, plus de vingt jours après sa disparition, de l'autre côté, dans le Pacifique, assez loin de la région en question... néanmoins il demeure plusieurs zones d'ombre sur sa trajectoire pour rejoindre le Pacifique, et un évènement survenu à cette même période pourrait laisser penser que le bateau ait été victime d'un séisme suivi d'un petit tsunami l'ayant entraîné au large...

Ce que l'on sait : le 3 octobre 1902, un trois-mâts allemand, le Freya, appareille à Manzanilla, petit port situé sur la côte méridionale de Cuba pour se diriger à Punta Arenas au Chili. Dans la mesure où le Canal de Panama n'est pas encore fini à l'époque, il est donc sensé faire le tour de l'Amérique du Sud pour remonter dans le Pacifique sur le Chili. Le problème est qu'il n'est jamais arrivé à destination et sera retrouvé 20 jours après la signalisation de sa disparition (dates inconnues), mais probablement dans le Pacifique si on suit l'article de Nature de 1907 :

" ...Un autre grand tremblement de terre s'est ajouté à ceux qui trahissent depuis peu un accroissement de l'acti­vité sismique et volcanique le long des côtes américaines du Pacifique. Les tremblements du fond marin sont fréquents dans cette région. Les navires en ressentent les contrecoups, même quand ces secousses passent inaperçues sur la côte. Une fois au moins un navire semble avoir fait naufrage à cause d'un phénomène de ce genre. Le cas est remarquable. Le 23 octobre 1902, un petit trois-mâts allemand, le Freya, fut retrouvé, vingt jours après son appareillage, partiellement démâté. Entre-temps, on n'avait eu de nouvelles ni du capitaine, ni de l'équipage. Rien ne pouvait expliquer l'état du navire, mais un petit calendrier, dans la cabine du capitaine, indiquait que la catastrophe avait dû se produire le 4 octobre, peu après que le navire eut gagné le large, comme l'ancre trouvée encore ballante à la proue sem­blerait le démontrer. Les bulletins météorolo­giques montrent que du 3 au 5 octobre, les vents étaient légers. Par ailleurs, de forts tremblements de terre secouèrent la région les 4 et 5 octobre. L'un d'eux causa probablement des avaries au Freya, que l'équipage a dû alors abandonner. " (Nature 25-04-1907).

Vous remarquerez de grosses incohérences sur ce cas : comment, s'il est bien parti de Cuba le 03-10-1902, le Freya aurait-il pu se retrouver dans le Pacifique, victime de séismes survenus les 4 et 5 dans le Pacifique, et retrouvé 20 jours après seulement dans le Pacifique ? Je rappelle : pas de Canal de Panama à l'époque... donc soit le Freya n'est pas parti de Cuba, soit il n'a pas été retrouvé dans le Pacifique mais bien dans l'Atlantique (pas de preuves concrètes là-dessus non plus !)...

Vague géante

Un phénomène marque les esprits le 29 août 1916, dans la bordure sud du Triangle, entre Cuba et Porto Rico. Deux navires de combat américain, le cuirassé Memphis et la canonnière Castine mouillent dans le port d'Hispaniola (ancien nom de l'île de Saint-Domingue-partagée entre Haiti et la République Dominicaine). Ce jour-là était ordinaire, avec un beau temps, un beau ciel bleu sans nuages, pas de vent et une mer d'huile. Mais en début d'après-midi, le Capitaine Kenneth Bennet de la Castine et le Capitaine Edward K. Beach, commandant du Memphis s'aperçoivent que leurs bateaux gîtent et tanguent anormalement et que cela augmente de minute en minute. Par prudence, ils donnent l'ordre de mettre les chaudières sous pression et de prendre le large, mais les mouvements désordonnés des navires retardent les manœuvres : les hommes d'équipage, ballottés d'une paroi à l'autre, ont du mal a effectuer convenablement leur tâche.

D'après les observations météorologiques de la journée, la mer est toujours calme... mais tout à coup, sans que rien ne laisse présager un phénomène si violent, des vagues gigantesques, comme "des murailles liquides", s'approchent à toute vitesse de la rade et déferlent sur les navires.

La Castine réussit à lever l'ancre à temps et à gagner la haute mer, mais la canonnière y rencontre autant de problèmes qu'à proximité du rivage. Là, les vagues ne déferlent plus mais, hautes et raides, elles sub­mergent tout : des marins passent par-dessus bord et la Castine subit des dommages matériels énormes.

Pendant ce temps, un drame se joue à bord du Memphis. Le cuirassé, ses chaudières détériorées en panne, ne peut quitter la rade. Les mécaniciens sont ébouillantés par les jets de vapeurs qui s'échappent des tuyaux brisés dans la salle des machines, ou précipités dans les chaudières et brûlés vifs. Des objets tombent de partout et il est impossible d'organiser une mise à la mer de chaloupes. Soudain, l'ancre est arrachée et le bateau est précipité sur les récifs pendant qu'à terre, des secours s'organisent pour tenter de sauver l'équipage. Un peu avant 17 heures, le gros cuirassé s'échoue sur le fond de corail, à trente mètres des rochers, les sauveteurs se précipitent et réussissent à évacuer l'équipage, morts, blessés et survivants juste à temps avant qu'une dernière vague monstrueuse fracasse le Memphis sur les rochers. Ce dernier n'est plus qu'une épave à la dérive.

Les océanologues s'interrogent encore sur l'ori­gine et la nature de ces vagues géantes qui cau­sèrent la perte d'un des plus grands navires de guerre de l'époque, orgueil de la flotte améri­caine. Probablement des grandes lames de fond consécutives à un séisme sous-marin, non détecté à l'époque. Mais, après ce dramatique nau­frage, le vaisseau devient le théâtre d'événements étranges.

Lorsque la mer se calme, quelques mem­bres de l'équipage se rendent à bord pour récupérer des vivres et du matériel, du moins ce qu'il en reste.

Dans un entrepont inférieur, s'élèvent soudain des gémissements difficiles à localiser et qui semblent provenir de multiples côtés à la fois. Les matelots se regardent, apeurés, mais concluent vite, avec soulagement, que ce ne sont que les craquements du navire ballotté par les flots.

Ils continuent leurs investigations et pénètrent alors dans un autre compartiment où une ombre insolite les attend. Ils avancent, la lampe braquée en avant, et se trouvent face à un spectre au visage morne et gris qui les regarde un instant avant de faire demi-tour.

Terrorisés, les hommes du Memphis s'enfuient à toutes jambes. Lorsqu'ils racontent leur étrange aventure, leurs camarades, incrédules, se mo­quent d'eux. Pourtant, deux autres spectres seront «rencontrés» par d'autres matelots. L'un de ceux-ci précisera même que « les fantômes res­semblaient à Teschak et Dugan, morts pendant la catastrophe».

Worley, le capitaine fou du «Cyclops»

Peu de temps avant la fin de la Première Guerre mondiale, la marine américaine perd un autre grand navire, le ravitailleur Cyclops.

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En janvier 1918, le Cyclops quitte Norfolk avec une cargaison de charbon, du courrier et du ravi­taillement pour la flotte de guerre américaine mouillée au large de la côte orientale de l'Amé­rique du Sud. Le navire est commandé par le capitaine de frégate George W. Worley.

D'après différents témoignages de marins, le capitaine Worley ne paraît pas jouir d'un excellent équilibre : il arpente le pont de son navire «le cigare au coin de la bouche, couvert de ses seuls sous-vêtements, et coiffé de son chapeau melon ».

Pendant la traversée, raconte Conrad Nervig, un enseigne de vaisseau qui a quitté le Cyclops peu de temps avant le naufrage, « il arriva des quantités de choses insolites sur la route de l'Amérique du Sud: d'abord, en quittant les chantiers navals de Norfolk, le Cyclops faillit entrer en collision avec le Survey qui partait à la chasse aux sous-marins en Méditerranée; la sou­pape de sécurité d'une chaudière sauta...; puis le navire dépassa le port de Rio (...) Puis il y eut le pauvre matelot noyé après avoir été assommé par une des hélices (...) »

Le 28 janvier, le Cyclops atteint Rio où Worley, selon les ordres reçus, fait monter à bord cinq condamnés à mort qu'il doit rapatrier. Puis il fait décharger le ravitaillement apporté à la flotte américaine.

Une semaine plus tard, le 3 février, le capitaine Worley fait charger une nouvelle cargaison (onze mille tonnes de manganèse) et remonte jusqu'à Bahia qu'il atteint le 21 février.

Le lendemain, le Cyclops prend le chemin du retour, à destination de Norfolk.

Mystérieuse escale à l'île de la Barbade

Malgré l'ordre de rallier Norfolk directement, le Cyclops, pour des raisons inconnues, fait escale à la Barbade, l'île la plus orientale des Antilles. Le 3 mars, il parvient à Bridgetown, située à l'ex­trémité occidentale de l'île, mais le petit port ne peut recevoir un navire de ce tonnage et Worley fait jeter l'ancre à un mille au large.

Le consul des Etats-Unis à la Barbade, Brockholst Livingston, se rend à bord du ravitailleur où le capitaine lui demande de l'argent, du charbon et du ravitaillement pour pouvoir gagner ... les Bermudes.

Le lendemain, le Cyclops met cap au sud et pénètre dans le triangle des Bermudes. Le 5 mars, le paquebot britannique Vestris, de la Lampert and Holt Unes, entre en contact radio avec le Cyclops qui semble poursuivre sa route dans d'excellentes conditions.

C'est la dernière fois que l'on entend parler du Cyclops qui disparaîtra avec 309 personnes à son bord.

La marine est fort inquiète

Le retard du plus grand ravitailleur de l'U.S. Navy n'est signalé officiellement que six semai­nes plus tard par le ministère de la Marine qui déclare:

« On ne trouve aucune raison satisfaisante pour expliquer le retard du Cyclops, puisque le navire n'a pas communiqué par radio et n'a laissé aucune trace depuis qu'il a quitté le port des Indes occidentales. Le temps, dans la région, n'a pas été mauvais et n'aurait guère pu créer de difficultés au Cyclops. Un sous-marin ou quelque autre assaillant pourrait l'avoir coulé, mais aucun rapport n'indique une présence ennemie dans la région...

» On a appris qu'un des deux moteurs du Cyclops avait eu une avarie et que le vaisseau naviguait à vitesse réduite à l'aide du second, adapté à cette fin. Mais même si ses moteurs avaient été complètement hors d'usage, on pouvait tout de même utiliser la radio.

» Les recherches se poursuivent mais la Marine se déclare fort inquiète pour la sécurité de ce navire.»
Selon les ordres du ministère, des instructions sont données à tous les bâtiments de ratisser le secteur fatidique, comme l'atteste cet article du Virginian Pilot en date du 16 avril 1918:

«Washington, 15 avril... Les autorités se refusent à croire que le grand ravitailleur de 19.000 tonnes et les 309 personnes à son bord pourraient avoir disparu sans laisser un seul vestige. Elles ont par conséquent donné l'ordre à tous les navires partis à sa recherche de passer au peigne fin la route du Cyclops et de visiter chacune des nombreuses îles qui parsèment cette région de l'océan.

» Les autorités de la Marine avouent franche­ment qu'aucune des hypothèses avancées jus­qu'ici pour expliquer la disparition du Cyclops... ne résiste à l'analyse. Une explosion qui se serait produite à l'intérieur du navire aurait pu détruire en un instant ses sources de pouvoir moteur et de T.S.F., mais il y aurait eu des épaves flottant encore pour marquer le lieu du naufrage.

» Un ouragan soudain, chose peu rare dans ces parages, aurait désemparé et englouti le navire, mais là encore, fait-on remarquer, la catastrophe aurait laissé quelques vestiges.»


Le capitaine Worley a-t-il trahi les U.S.A.?

Après bien des efforts, les recherches sont abandonnées dans le courant du mois de mai.

Le service de renseignement de la Marine retient plusieurs hypothèses. En premier lieu, l'équipage mutiné se serait rendu maître du navire qu'il aurait emmené loin des routes com­merciales. Oh envisage ensuite la possibilité de trahisons, d'une part du capitaine Worley, d'ori­gine allemande, qui aurait livré son bâtiment à l'ennemi, d'autre part d'un passager, le consul général des U.S.A. à Rio de Janeiro, connu pour ses sympathies envers l'Allemagne. Le Cyclops aurait peut-être été torpillé et sa cargaison, très inflammable, aurait explosé. Enfin, dernière hypothèse, le Cyclops aurait sombré à la suite de tensions provoquées par le tangage.

L'étonnant télégramme, adressé par le consul américain à la Barbade, Livingston, au départe­ment d'Etat américain, n'apporte pas d'éclair­cissement au mystère de la disparition du ravitail­leur.

En voici le texte :

«Secrétaire d'Etat
Washington 17 avril, 14 heures.

«Référence message confidentiel du départe­ment daté du 15, commandant Cyclops déclarait avoir besoin 600 tonnes charbon pour atteindre Bermudes. Moteurs très mauvais état. Fonds insuffisants et demanda paiement par moi, pro­cédure inhabituelle. Ai appris qu'il a chargé ici une tonne de viande fraîche, une tonne de farine, plusieurs tonnes de légumes, le tout payé 775 dol­lars. Ai appris de différentes sources ce qui suit. Il avait assez de charbon, de qualité paraît-il infé­rieure; il en a pris probablement plus de 1500 ton­nes. Le commandant est appelé par beaucoup le «damné Hollandais», apparemment mal vu par les autres officiers. Rumeurs de troubles pendant le voyage jusqu'ici ; des hommes arrêtés, un autre exécuté; également complot de prisonniers. Consul général des Etats-Unis Gottschalk parmi les passagers. 231 hommes d'équipage plus offi­ciers et passagers. Ci-joint noms des membres de l'équipage, liste passagers et officiers incomplète. 

Nombreux noms germaniques. Nombreux mes­sages télégraphiques ou sans fil adressés au commandant ou au navire, arrivés ici au port. Tous les télégrammes pour la Barbade transmis au bureau principal Saint Thomas. Suggère les examiner de près. Sans avoir aucune preuve for­melle, crains pire que naufrage, bien que peut-être influencé par antipathie instinctive pour le commandant.
Livingston, consul.»


La réception de ce message ne fait que rendre l'affaire plus obscure pour le ministère de la Marine. Cette disparition du Cyclops ne sera jamais éclaircie et reste l'une des énigmes les plus déconcertantes des annales maritimes.


Le cimetière des marins

Trois ans environ après, le triangle des Bermudes défraie à nouveau la chronique avec l'affaire du Carroll A. Deering.

Le 31 janvier 1921, par un matin froid et gris, cette goélette à cinq mâts est retrouvée échouée sur les Diamond Shoals, à 90 miles du cap Fear, au large de la Caroline du Nord, face aux Bermudes. A part deux chats épargnés par l'océan en furie qui avait balayé le pont, le navire était complète­ment désert.
La presse ne tarde pas à s'emparer de l'affaire. Le 5 février, un correspondant dépêché sur les lieux par son journal, le Virginian Pilot, livre aux lecteurs les premiers éléments de son enquête.

« On a appris de façon sûre que la goélette aban­donnée toutes voiles dehors... est le Carroll A. Deering... On a pu monter à bord... et, après une inspection rapide, on s'est rendu compte que le navire était irrécupérable. L'action incessante des vagues avait déchiré ses coutures et la désinté­gration par l'eau avait affaibli sa cale au point qu'on ne saurait songer à la réparer...

» A son départ pour l'Amérique du Sud, en sep­tembre dernier, il était sous les ordres du capitaine Merritt, l'un de ses propriétaires, l'autre étant G.G. Deering, qui avait baptisé le navire du nom de son fils. Après quelques jours, Merritt tomba malade et dut revenir...

» Le capitaine Wormwell, un vieux loup de mer de 66 ans, qui avait pris sa retraite trois ans auparavant, le remplaça. Il fit l'aller avec succès et, au retour, il se rendit jusqu'aux Diamond Shoals, autant que l'on puisse voir, où il fit naufrage. Comment le navire a-t-il pu être abandonné, toutes voiles hissées et sans être apparemment endommagé, c'est encore un mystère. On n'a pas de nouvelles du capitaine Wormwell ni d'aucun autre membre de l'équipage.

» Certains ont cru à une mutinerie, mais cette conjecture ne tient pour ainsi dire pas. Les hauts-fonds de cet endroit sont connus depuis long­temps comme «le cimetière des marins». Quel­ques-uns pensent qu'un terrible vent s'est levé quand le Deering passait au large et que l'équi­page, connaissant par tradition sa dangereuse situation, aurait été pris de panique et aurait tenté de gagner le rivage dans les canots. De deux choses l'une, en ce cas : la tempête qui, on le sait, avait cours, aurait fait chavirer les canots ou bien un autre navire aurait pris les naufragés à bord.»


Un mystérieux message dans une bouteille

Durant tout le mois de février 1921, les autorités maritimes américaines mènent une enquête serrée pour découvrir les raisons de ce drame. Des recherches sont entreprises au large de la Caroline du Nord pour retrouver les marins disparus. Mais là, nulle trace: le triangle maudit semble avoir englouti tout l'équipage.

Les choses en restent là, quand brusquement l'affaire rebondit en juin 1921, quelques mois après la tragique découverte du Carroll A. Deering.

Dans un article retentissant publié en première page du New York Times, le 21 juin 1921, le grand quotidien américain évoque le drame du Deering et se demande s'il ne doit pas être relié à certaines autres disparitions. Sans formuler une accusation précise et directe contre l'Union soviétique, le New York Times laisse cependant entendre que les pirates sont peut-être des «sympathisants soviétiques».

Voici le texte de cet important article:

«L'équipage du navire américain a disparu et des preuves apparemment concluantes démon­trent que ces hommes ont été faits prisonniers par un autre vaisseau, puis amenés on ne sait où, si toutefois on ne les a pas assassinés.

»Un deuxième navire américain est depuis longtemps en retard et l'on est sans nouvelles de deux autres bateaux américains dans des circons­tances qui donnent à penser que leur disparition est liée de quelque façon à la capture de l'équi­page du premier navire mentionné ci-haut.

»Le gouvernement des Etats-Unis a entrepris d'éclaircir ces mystères qui, de l'avis des auto­rités, indiquent une recrudescence de la pira­terie d'antan au large de la côte de l'Atlantique ou bien donnent lieu de croire que ces navires auraient été capturés pour le bénéfice de la Russie soviétique.

»Les autorités accordent qu'il n'est pas facile, de nos jours, de croire à des actes de piraterie perpétrés dans les eaux territoriales des Etats-Unis ou à proximité, mais les indices sont tels qu'on ne peut faire autrement que de soupçonner pareille chose.

»Le département d'Etat... le département du Trésor, par le truchement de la Garde côtière... la Marine... le département du Commerce... (et) le département de la Justice... travaillent sur ces affaires en se basant sur l'hypothèse d'une rela­tion entre ces mystérieux incidents.

»ll y a plusieurs mois, la goélette à cinq mâts Carroll A. Deering de Portland, Maine, a été trou­vée abandonnée aux Diamond Shoals, Caroline du Nord, toutes voiles hissées et déserte... Tout indiquait qu'on l'avait abandonnée en hâte et sans motif imaginable, car le navire était en bon état et avait des réserves de nourriture. Un repas allait même être servi. Cependant, ses canots avaient disparu.»

Et voici que, un peu plus tard, une bouteille roula jusqu'à la rive. Elle contenait un message... qui se lisait comme suit:

«Un navire-citerne ou un sous-marin fonction­nant au mazout nous a abordés et a mis notre équipage aux fers. Avertissez le siège social de la compagnie tout de suite».

«Le Deering avait un équipage de douze hommes, y compris le capitaine. On n'en a pas retrouvé trace... On a comparé l'écriture du mes­sage avec celle de l'officier de bord et les experts en calligraphie s'accordent à dire que la note est bien de lui.

»Le steamer d'acier Hewitt, de Portland, Maine,... manque également à l'appel. Il était peut-être au large des Diamond Shoals vers le temps où le Deering s'est échoué, et les auto­rités sont d'avis qu'il navigue encore et qu'il est intact.

»Un  porte-parole du département du Commerce a déclaré aujourd'hui que deux autres steamers américains ont disparu dans des cir­constances qui, selon les autorités... indiquent qu'ils n'ont pas sombré. Les milieux officiels, on l'admet ouvertement, soupçonnent que ces na­vires ont été victimes soit de pirates, soit de sym­pathisants soviétiques. On n'a pu s'assurer des noms de ces navires et les autorités sont restées très vagues sur les détails de ces disparitions.»


Pirates soviétiques ou mauvais temps?

Deux jours après la publication de cet article, les services de la police new-yorkaise semblent confirmer la thèse d'une action soviétique et révè­lent qu'effectivement des ouvriers russes des Etats-Unis et du Canada ont, un an auparavant, résolu que certains de leurs membres s'embau­cheraient à bord de steamers, se mutineraient, puis dirigeraient ces bâtiments vers des ports soviétiques.

Mais cette hypothèse, qui concorde avec certai­nes pratiques soviétiques, à l'époque et plus tard, ne tarde pas à faire long feu. Il semble bien que seul le mauvais temps ait provoqué cet effroyable drame ; c'est du moins ce qu'affirment les respon­sables du bureau météorologique américain.

«Les autorités du bureau météorologique ont exprimé ce soir l'hypothèse qu'une partie des quelque douze navires réputés disparus mysté­rieusement dans l'Atlantique Nord auraient trou­vé leur perte au cours des tempêtes particulièrement violentes qui se sont abattues sur la région dans les premières semaines de février 1921.

» Des relevés montrent qu'une tempête, durant laquelle les vents ont atteint une vitesse de 90 miles à l'heure, a balayé des routes de l'Atlantique Nord vers le 6 février sur une distance 1000 miles. Cette tempête a duré trois jours. De nou­veau, le 15, une tempête s'est élevée au milieu de l'océan et a fait rage pendant 72 heures.

» La disparition de l'équipage entier de la goé­lette Carroll A. Deering..., s'explique peut-être par le fait que, ayant tenté de s'échapper dans les canots, il aurait ainsi couru à sa perte...

»Un certain nombre de navires... ont subi les tempêtes de février et ont pu gagner les ports, mais non sans avaries.»

«Danger comme un poignard»

Quatre ans après l'affaire du Deering, une nouvelle tragédie «bermudienne» frappe cette fois un navire japonais, le Raifuku Maru.

Selon Charles Hocking, auteur du Dictionary of disasters at Sea (1) (Le Dictionnaire des drames de la mer), le «vaisseau japonais Raifuku Maru quitta Boston le 18 avril 1925, à destination de Ham­bourg, avec une cargaison de blé. Peu après, il dut faire face à une très grosse mer et, le lendemain matin, il était en détresse. Il lança un S.O.S. qui fut capté par le Homeric, paquebot de 34 356 tonnes, sous les ordres du capitaine Roberts, à 70 miles de là. Ensuite, il y eut un autre message, qui disait que tous les canots de sauvetage étaient en mor­ceaux. Enfin, un dernier message disait: «Som­mes maintenant en grand danger. Venez vite.»

«Le Homeric capta ce message juste avant d'apercevoir l'épave. Le paquebot fonçait vers l'endroit indiqué à travers une mer houleuse, à une vitesse de 20 nœuds. L'endroit est à 41° 43' de latitude nord et 61° 39' de longitude ouest, soit à 400 miles à l'est de Boston et 700 miles directe­ment au nord des Bermudes [sur la frange nord du triangle]. Il trouva le cargo incliné à 30 degrés et passablement désemparé. Il approcha aussi près que possible de celui-ci dans l'espoir de recueillir les survivants, mais les 48 membres de l'équipage s'étaient tous noyés, car la mer était démontée.»

Les enquêteurs chargés de l'affaire n'ont pas manqué d'être extrêmement intrigués par le texte du premier message adressé par le navire japo­nais: «Danger comme un poignard (...) Nous ne pouvons échapper

Bien des années après la catastrophe, les auteurs qui se sont penchés sur le naufrage du Raifuku Maru ont envisagé deux hypothèses: les uns affirment que le vaisseau a été enlevé par des O.V.N.I., tandis que d'autres pensent simplement qu'un cyclone l'aurait envoyé par le fond.

La première hypothèse paraît, il faut le recon­naître, quelque peu invraisemblable.

Les engins extra-terrestres sont généralement décrits, on l'a vu, sous forme de soucoupes, de dômes, de cigares mais jamais de poignard ! Ce­pendant, les partisans de cette théorie soutien­nent que les messages du Raifuku Maru laissent entendre que l'équipage a été frappé de stupeur: « Danger comme un poignard... Nous ne pouvons échapper... Venez vite!» Cela ne rappelle-t-il pas, disent les défenseurs de cette hypothèse, l'im­pression de paralysie, d'hébétude, de terreur res­sentie par les nombreux témoins qui ont vu des O.V.N.I.?


L'appel au secours d'un homme effrayé

La deuxième hypothèse, bien que plus vrai­semblable, se heurte, elle aussi, à quelques difficultés.

Si les météorologistes ne s'accordent pas sur la capacité de destruction d'un cyclone, tous admet­tent cependant qu'une tornade en mer peut oc­casionner bien des dégâts et entraîner parfois de véritables catastrophes. Mais qu'est devenue l'épave du cargo japonais? A-t-elle été complète­ment pulvérisée?

Et comment expliquer le message du Raifuku Marul ? Certains suggèrent que l'équipage japo­nais, n'ayant jamais essuyé de tornade, a été frappé par sa ressemblance avec un coup de poignard. C'est peu plausible car tout marin est capable de décrire en termes simples et précis un cyclone, une tornade, une tempête, un raz de marée, ou n'importe quel phénomène physique naturel. (YH : les japonais connaissent très bien le même phénomène appelé typhon chez eux...)

On peut donc supposer que le radio s'est trouvé face à quelque chose d'anormal, qu'aucun terme technique ne pouvait décrire. Mais qu'a-t-il ren­contré? Qu'a-t-il vu? Qu'a-t-il ressenti? Son mes­sage est l'appel au secours d'un homme effrayé, mais par quoi? L'énigme reste entière...

YH : Pour régler les problèmes d'assurances, les enquêteurs ont conclu, sans autre preuve que leurs déductions, que le message était à l'origine " Now very danger. Come Quick ! (Danger imminent. Venez vite !) " mais que des interférences éléctriques auraient fait croire à " « Danger poignard. Venez vite ! »...

(1) Ce dictionnaire a été établi à partir des archives de la Lloyd's, la célèbre compagnie d'assurances londonienne qui en dirigea la publication.


La liste des cargos, des bateaux de pêche ou de plaisance, des steamers disparus dans le triangle des Bermudes ne fait que s'allonger avec le temps qui passe.

Souvent ces bateaux s'évanouissent en mer, sans le moindre indice, la moindre épave, comme  l'Esperanza de Larrinaga, un bâtiment britanni­que; le Monte San Michèle, un navire italien; le Cabello, un bateau brésilien; l'Ottawa, un tanker anglais; le Streisund, le Florino et le Svartskog, tous trois battant pavillon norvégien.

Citons encore le Copotaxi, parti de Charleston pour La Havane le 29 novembre 1925 avec une cargaison de charbon. Il ne parviendra jamais à destination et toutes les recherches entreprises pour le retrouver demeureront vaines.

L'année suivante, le 13 mars 1926, le cargo Suduffco quitte Port Newark, dans le New-Jersey, à destination de Los Angeles. Il passera donc dans le triangle des Bermudes. A son bord, un équi­page de 29 hommes et une cargaison diversifiée de 4000 tonnes dont un gros chargement de tuyaux d'acier. Le cargo sera attendu en vain à Los Angeles et personne n'entendra plus jamais parler de lui. Le 08 avril 1926, un dirigeant de la société Transmarine corporation, propriétaire du bâtiment, affirme que le Suduffco a été «comme avalé par un gigantesque monstre marin». Et il ajoute : «Tout ce qu'on sait, c'est qu'il a disparu au sud du New Jersey, dans le triangle des Ber­mudes».


Drame à Islamorada

La terrible malédiction qui semble régner dans ce triangle ne s'exerce pas seulement sur les ba­teaux : les îles qui s'y trouvent ne sont pas épargnées.

Le 5 septembre 1935, la petite île de Islamorada, qui fait partie de l'archipel des Keys prolongeant au sud la Floride, est le théâtre d'un drame affreux.


Pour les habitants de l'île, rassemblés dans les cafés autour de la gare, c'est un jour de fête.

Karl Sudor, un des rares pêcheurs à être en mer ce jour-là, remarque vers midi que le vent se lève. Il regagne la terre à grand-peine, car les rafales augmentent de minute en minute, annonçant un terrible ouragan.

Aussitôt, à Miami, les services des chemins de fer organisent l'évacuation des insulaires mena­cés. Un train de secours, appelé « le chemin de fer de la mer», est envoyé à travers les vingt-neuf îles reliées entre elles par des ponts ou des viaducs en pierre.

A Islamorada, la tempête est à son paroxysme et les mille habitants de l'île, massés sur les quais de la gare, se cramponnent aux rails ou s'accrochent aux poteaux télégraphiques, pour ne pas être emportés. Des dizaines de mal­heureux sont décapités à l'arrivée du train; affolés, les survivants se ruent dans les wa­gons; à ce moment une vague monstrueuse, venue de la mer déchaînée, balaie tout sur son passage.

Le lendemain, à l'aube, les rescapés découvrent un spectacle de cauchemar : des cadavres gisent, ici et là, par centaines, les maisons ont disparu et le sol est recouvert de décombres.

« Avec la chaleur du soleil, l'odeur devenait insupportable, raconte Karl Sudor, un des rares rescapés de ce cataclysme qui fit plus de six cents morts. Les cadavres puaient, les vivants vomis­saient. J'avais peine à reconnaître les visages de mes amis de la veille. Le sol de l'île étant fait en grande partie de corail à peine recouvert d'une mince couche de terre, il fut impossible d'enterrer la plupart des corps. Ils furent empilés comme des bûches et brûlés. Pendant plusieurs jours, la mer continua de rejeter des cadavres sur le rivage. D'où venaient-ils, il était impossible de le dire.

C'était pis que tout ce que j'avais pu voir pendant la guerre.»

Le train fantôme qui tue

Une grande partie des survivants quitte l'île dévastée mais Karl Sudor décide de rester sur place.

Il achète un petit bateau pour faire visiter l'archipel aux touristes à qui il décrit volontiers les ravages du terrible ouragan. Il ajoute même qu'il connaît un endroit où il reste quinze mètres de rail et, précise-t-il, «certains soirs, le train de secours surgit de la mer, se promène à Islamorada pen­dant quelques heures puis s'abîme à nouveau dans l'océan».

Naturellement, personne ne le croit. Dans l'île, il est surnommé « le roi des pêcheurs et... des men­teurs» !

Peu après la Seconde Guerre mondiale, Sudor est devenu un vieil homme excentrique ; il a perdu un œil dans un accident et subi plusieurs opéra­tions au cerveau. Il raconte de plus en plus sou­vent l'histoire du «train fantôme» qui revient les nuits de tempêtes.

Un soir où le vent souffle plus fort qu'à l'ac­coutumée, après une partie de poker avec des amis, Sudor regagne sa petite cabane.

Pendant deux jours, personne ne le voit. Finale­ment, un peu inquiet, son ami Pinney se rend chez lui accompagné d'un policier. Personne ! Les deux hommes effectuent des recherches autour de la maison. Soudain, Pinney s'exclame:

- Viens voir! Des rails! Il y en a au moins quinze mètres! Sudor n'était pas aussi cinglé que ça!

Le policier ne répond pas. Planté au milieu des voies, il regarde fixement quelque chose à ses pieds. Pinney s'approche et s'arrête, blême d'horreur : le corps de Karl Sudor est là, coupé en deux, et... la rouille a disparu des rails comme si un train était passé récemment...

- Alors, c'était vrai, son histoire de train? gémit Pinney.

Après cette effroyable catastrophe d'Islamorada, le triangle des Bermudes connaît, pendant quelques années, une certaine accalmie. Mais, peu de temps avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, de nouvelles disparitions sont signalées dans le triangle maudit.


Un chien trouvé seul sur un navire à la dérive

Le 21 octobre 1944, des bâtiments de la Marine américaine aperçoivent le cargo cubain Rubicon en train de dériver le long de la côte est de la Floride, au large de Key Largo.

Voici ce que dit à ce sujet le New York Times à la date du 23 octobre 1944:

«Un mystère maritime qui rappelle celui du Mary Céleste, célèbre il y a longtemps, vient d'arriver : un cargo cubain a été trouvé à la dérive, dans le Gulf Stream. Il n'y avait pas âme qui vive à bord, sauf un chien.

»Le vaisseau a peut-être été victime de l'oura­gan des Caraïbes. Un dirigeable de la Marine l'a aperçu hier et a signalé sa présence à la Garde côtière. On a dépêché deux bateaux de Miami pour le chercher. Il s'agit du Rubicon, navire jaugeant quelque quatre-vingt-dix tonnes brutes.

»Ses canots ont disparu, mais les effets per­sonnels de l'équipage étaient encore à bord. Une aussière (1) pendait à la proue. Les premières nou­velles n'indiquent pas si les amarres des canots de sauvetage avaient été coupées ou si elles avaient glissé, ou bien si elles s'étaient rompues.

»Les navires chargés de la recherche ont fait parvenir un radio pendant le remorquage du Rubicon... disant que celui-ci était selon toute apparence en excellent état...

»0n ignore tout du sort de l'équipage, et la dernière note au journal de navigation du bord remonte au 26 septembre, alors que le navire entrait au port de La Havane. Le Rubicon avait apparemment fait du cabotage le long de la côte cubaine avant cette date.

»0n croit que tous les membres de l'équipage étaient à terre lorsque l'ouragan frappa La Havane. Ils auraient laissé le chien à bord. Les amarres du navire auraient cédé.»

L'hypothèse proposée par le journal américain semble écarter tout mystère. Mais, comment expliquer, malgré tout, que l'équipage du Rubicon n'ait jamais donné signe de vie ?


«Nous entrons dans l'eau blanche... nous sommes complètement perdus»


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Sept mois après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, la malédiction qui pèse sur le triangle des Bermudes frappe cette fois une formation entière d'avions américains : la disparition du «Vol 19» constitue, encore aujourd'hui, une des énigmes les plus tragiques dans les annales de l'aviation américaine.

Le 5 décembre 1945, cinq appareils Grummans JBM3 Avengers de l'aéronavale américaine, bom­bardiers équipés de torpilles, décollent de Fort Lauderdale, en Floride, avec un équipage de treize hommes chacun. Après avoir accompli un exer­cice de bombardement, les appareils mettent le cap à l'est pour regagner la base. Soudain, le radio de la tour de contrôle reçoit un message du com­mandant de vol, le lieutenant Charles Taylor :

Taylor: - J'appelle la tour de contrôle... Cas d'urgence... Nous semblons avoir dévié de notre route... Nous n'apercevons plus la terre... je répète: nous n'apercevons plus la terre...
La tour: - Quelle est votre position?
Taylor: - Nous ne sommes pas certains de notre position... Nous ne savons pas exactement où nous nous trouvons... Nous semblons perdus...
La tour: - En principe, vous devriez aller vers l'ouest.
Taylor: - Nous ne savons pas où se trouve l'ouest... Quelque chose ne tourne pas rond... C'est bizarre... Nous ne sommes plus sûrs d'aucune direction... Même la mer paraît bizarre...


Il devient ensuite de plus en plus difficile de capter les messages du «Vol 19». Les avions ont perdu le contact avec la tour qui, par moments, surprend des bribes de conversations entre les pilotes: ils parlent de manque possible de carburant, d'un vent de 75 nœuds, de compas magné­tiques et gyroscopiques affolés.

Selon certains rapports, les derniers mots en provenance du «Vol 19» sont: « Nous entrons dans l'eau blanche... Nous sommes complète­ment perdus...»

L'hydravion de recherche disparaît à son tour

Fort Lauderdale envoie sur-le-champ un Martin Mariner, gros hydravion, pour porter secours aux cinq Avengers.


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Une heure après son départ, le Martin Mariner disparaît à son tour: la tour de contrôle essaie en vain d'entrer en contact avec son pilote.

Voici le témoignage du radio-télégraphiste de seconde classe Vernon D. Clary:

«Juste avant 7 heures 30, le Martin Mariner émit son message de départ... Son premier signale­ment de position était censé arriver à 8 heures 30 du soir. Comme il n'avait pas encore appelé la base à 8 heures 35, l'opérateur tenta d'en­trer en contact avec lui. Il l'appela continuellement pendant une heure sans jamais obtenir de réponse.»

Qu'est-il advenu du Martin Mariner ? Le com­mandant de la Garde côtière des U.S.A., William J. Lawrence, explique:

«A 9 heures 12 du soir, je reçus l'information du Centre des opérations conjointes, de Miami, qu'une explosion avait été vue du SS Gaines Mills au 28° 59' nord, 80° 25' ouest, à 7 heures 50 du soir... Il s'agissait d'une grosse explosion, à ce qu'on disait, et les flammes avaient duré plusieurs minutes. On a présumé qu'il pouvait s'agir du Martin Mariner avec lequel nous tentions de communiquer sur la fréquence de 3000 kilocycles sans pouvoir y réussir. Suivant l'information reçue, l'explosion aurait eu lieu à 7 heures 50 du soir, soit exactement 23 minutes après le décol­lage de l'appareil. L'explosion s'est produite à 45 milles marins de la région aéronavale de Banana River.

»... Le maître du SS Gaines Mills précisa qu'un avion sembla prendre feu dans les airs, s'abîma rapidement dans les eaux et explosa, laissant une nappe d'huile et des débris que les membres de l'équipage ont pu constater. L'officier de quart du navire New-Smyrna déclara plus tard qu'il n'avait pas vu de débris et que, si on en avait aperçu, la mer était trop houleuse pour qu'on puisse les recueillir.

»... Le SS Gaines Mills n'a pas aperçu d'épaves autres que celles déjà mentionnées et ne les a pas ramassées vu l'état de la mer.»

Le rapport de la Marine conclut que le Martin Mariner a explosé pour «des raisons inconnues» à la position suivante: 28° 59' nord, 80° 25' ouest.

Mais est-ce bien du Martin Mariner qu'il s'agit?

En fait, rien ne le prouve car, en dépit de recherches intensives auxquelles participent 240 avions, 70 appareils du porte-avions Solomons, 4 contre-torpilleurs, 18 vedettes garde-côtes, des centaines d'avions privés, des yachts et des bateaux de tous ordres, on ne découvre rien : pas un canot pneumatique, pas la moindre tache d'huile, pas le moindre débris !

Peu après 19 heures, la station aéronavale de Opa-Locka, à Miami, a capté une émission à peine audible qui répète inlassablement: «FT... FT...»; c'est l'indicatif du «Vol 19».

Ce message provient-il réellement des Avengers ?

Le rapport publié par la Marine américaine après plusieurs mois d'enquête ne fournit aucune explication à ce drame.

Après avoir enregistré les faits, les enquêteurs réunissent un certain nombre de témoignages émanant de pilotes ou de radio-télégraphistes restés en contact avec les Avengers.

Ces récits, qui mentionnent un mauvais fonc­tionnement des compas, un refus du comman­dant Taylor de se brancher sur la fréquence radio d'urgence, ne font qu'épaissir le mystère.

Pourquoi les pilotes ne voyaient-ils plus la mer et le soleil ? Qu'étaient ces eaux blanches? Autant de questions sans réponses...

YH : Les seules conclusions officielles trouvables font état d'une subite tempête localisée et de vents puissants ayant entraîné les avions là où ils ne pensaient pas être :   " Le ciel était clair lorsqu’ils décollèrent de Fort Lauderdale mais une tempête se déclencha soudain.

Seul le lieutenant Taylor était un pilote expérimenté. Les cinq autres pilotes n’avaient que 300 heures de vol dont 60 sur ce type de bombardier.

D’après les messages échangés, les pilotes se sont perdus au milieu de la tempête. Les pilotes pensaient s’être trompés de direction. Ils crurent reconnaître les Keys de Floride alors qu’ils se trouvaient au-dessus de Great Sale Cay, dans les Bahamas. 

A cause de cette confusion, le chef d’escadrille donna les indications pour se diriger sur les Keys et retrouver Fort Lauderdale. Cette erreur de position a été fatale aux cinq pilotes. 

L’un des messages de Taylor nous éclaire sur l’issue de ce drame :

« Formation rapprochée. Si la terre n’apparaît pas bientôt, il va falloir tenter un amerrissage forcé. Lorsque le premier d’entre nous n’aura plus que 45 litres de carburant, nous descendrons tous ensemble... »


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Sur une mer déchaînée, un bombardier de ce type ne peut rester en équilibre plus de quelques minutes." L’enquête rappelle tout de même que le lieutenant Taylor, un excellent pilote de combat, avait tendance à voler à l’intuition et s’était déjà perdu. Il avait même déjà du se poser en pleine mer et être secouru...

Le mystère du «City Bell»

Un an jour pour jour après la disparition du «Vol 19», le 5 décembre 1946, le sloop City Bell est trouvé complètement abandonné à environ 300 miles au sud-est de Miami, par un navire américain de la base de l'île Great Exuma, aux Bahamas, qui effectuait une mission de routine.

Détail déconcertant: les canots de sauvetage étaient correctement suspendus à leur place. Que s'est-il passé? Que sont devenus les matelots du City Bell ? S'agit-il d'un nouveau drame compa­rable à celui du Mary Celeste ?

Selon le Nassau Guardian, le City Bell a peut-être été victime du mauvais temps. «On croit, lit-on dans ce journal, que les vents puissants qui ont soufflé cette semaine ont forcé les passagers et l'équipage du City Bell à quitter leur navire tandis qu'il faisait route de Nassau vers l'île Turque. On a déclaré ce matin à l'officier du port... que le sloop a été vu entre Hag-Cay, l'île Exuma et Sandy-Cay. Le bateau était désert. Nous n'avons pas été à même de vérifier le bien-fondé de la rumeur selon laquelle un navire de sauve­tage américain aurait pris des occupants à son bord. La cargaison, dit-on, est intacte. De nombreux autres petits bateaux, à ce qu'on prétend, auraient éprouvé des difficultés au cours de la récente tempête, mais on n'en sait pas davantage pour l'instant.»

Une catastrophe absolument inexplicable

Et la liste noire continue de s'allonger...

Le 27 janvier 1948, un avion de la British south american airlines, le quadrimoteur Star Tigerquitte Londres à destination de Kingston (Jamaï­que) avec 31 personnes à bord, dont 25 passagers. L'avion devait d'abord faire escale à Lisbonne où il était censé passer la nuit, puis à Santa Maria, aux Açores, avant d'arriver aux Bermudes.

Le 29 janvier1948, le contact radio est perdu après un dernier message du Star Tiger indiquant la position de 380 miles au nord-est des Ber­mudes. Aucun S:O.S. n'a été capté et l'on ne retrouvera, par la suite, ni épave, ni traces des occupants de l'avion.

Le ministère de l'Aviation civile de Grande-Bretagne entreprend une enquête mais les recher­ches se révèlent inutiles, comme l'indique le très long rapport publié par les autorités anglaises à la suite de cette catastrophe.

Ses auteurs examinent d'abord les causes pos­sibles de l'accident : « II y a tout lieu de croire que l'avion n'a lancé aucun appel de détresse, car il y avait nombre de postes récepteurs à l'écoute sur les fréquences réservées aux avions, et personne n'a jamais déclaré avoir capté pareil message. Il est possible, tout d'abord, que l'équipement de radio du bord ait fait défaut. Un incident est peut-être alors survenu... que l'équipage ne pouvait signaler... Celui-ci, privé des renseignements de navigation que la radio assure, a pu être dans l'impossibilité de trouver les Bermudes avant l'épuisement de ses réserves de carburant... Mais une autre hypothèse est possible : un accident serait arrivé avec une telle rapidité qu'il n'y aurait pas eu moyen de lancer d'appel ; ou encore, un tel message aurait paru superflu jusqu'à ce qu'il fût trop tard.

» L'hypothèse d'une panne complète de l'équi­pement radio semble extrêmement faible, à moins de l'expliquer par un arrêt à la source du courant direct, car l'équipement en question est en double...; on a en effet suffisamment prévu tous les genres de panne normale.

» Quant à la source du courant direct, elle est assurée par deux générateurs indépendants, qui chargent en outre une pile d'emmagasinement... Seule une panne affectant à la fois les deux géné­rateurs et la pile pouvait paralyser l'équipement... Cette possibilité est très mince.

»Une telle hypothèse est donc à peine conce­vable... Si la radio avait fait défaut peu après 3 heures 15, le navigateur aurait eu à trouver les Bermudes, distantes à ce moment-là d'environ 340 miles marins, soit l'équivalent de deux heures et demie de vol, sans l'aide des relèvements de position par radio et sans renseignements sur l'état du vent obtenus de la même façon. La cible se trouvait dans un petit groupe d'îles entourées sur leurs côtes de puissants phares marins... visibles d'approximativement 30 miles dans toutes les directions. L'avion aurait disposé d'environ trois heures et trois quarts pour s'y rendre avant l'épuisement de ses réserves de carburant.

»En avançant en fonction de la position déterminée à 3 heures 15, le navigateur aurait décidé d'une direction qui, vu les conditions du vent, l'aurait amené à moins de 30 miles des Bermudes vers 5 heures 30... Il eût été facile de repérer l'île dans un court laps de temps, vu les conditions de visibilité qui existaient.

»0n peut écarter l'idée qu'une panne d'élec­tricité ait pu empêcher l'avion de se tenir sur sa route, car s'il était vrai que le compas gyroscopique à contrôle magnétique eût alors cessé de fonctionner, deux compas à cuvette d'une grande précision pouvaient encore servir...

»ll semble donc que l'avion aurait très proba­blement atteint les Bermudes, même si le navi­gateur avait dû travailler sans autres données que celle à portée de sa main...

»Par conséquent, on suppose apparemment sans raison que le Star Tiger soit tombé dans la mer pour avoir été privé de radio et pour avoir ensuite raté sa destination et finalement manqué de carburant.»

«On ne saura jamais ce qui est arrivé dans cette affaire»

Dans ce même rapport, les enquêteurs (preu­ves à l'appui) démontrent que le Star Tiger n'a pas été victime d'un défaut de construction, d'une erreur altimétrique ou d'une panne de moteurs.

Le Star Tiger a-t-il alors succombé à un incen­die, une perte de contrôle ou une panne de carburant?

« Non, répondent les enquêteurs, rien ne justifie l'une ou l'autre de ces trois hypothèses.»

En fait, si l'on en croit les conclusions du rapport, la disparition du Star Tiger défie toutes les explications, car chacune semble trop peu plausible pour être retenue.

« En terminant ce rapport, constatent les enquê­teurs, on peut vraiment conclure que jamais une affaire aussi déroutante n'a fait objet d'enquête. Vu l'absence de toute preuve fiable touchant la nature et la cause du désastre, la commission n'a pu mieux faire que d'indiquer des possibilités, dont aucune ne semble même probable. Dans toute activité où entre en ligne de compte l'action de l'homme et de la machine, il y a deux éléments très différents à retenir. Tout d'abord, l'élément humain, imprévisible parce qu'il appartient à une réalité imparfaitement connue; ensuite l'élément mécanique, sujet à des lois tout autres. L'un ou l'autre peuvent faillir, ou les deux simultané­ment. II arrive aussi qu'une cause extérieure ait raison à la fois de l'homme et de la machine. On ne saura jamais ce qui est arrivé dans cette affaire et le sort du Star Tiger restera pour tou­jours une énigme.»

On note aussi que la météo n'a pas émit de rapports officiels sur les conditions atmosphériques entre les Açores et les Bermudes, trajet de l'avion sur-équipé pour l'époque, probablement par manques de données fiables...


Une véritable épidémie!

Deux jours après la perte du Star Tigerun autre appareil de la British south american airlines qui devait atterrir aux Bermudes vers  minuit, envoie le message   suivant:   «Notre   position approximative 400 miles (640 kilomètres) dans votre nord.  Conditions  météo et mécaniques excellentes. »

II est 22 heures 30. Ce sera le dernier de l'appareil.

Le 5 mars 1948Al Snyder, le célèbre jockey américain, quitte Miami avec plusieurs de ses amis pour une partie de pêche au large de Sandy Key. Le yacht est retrouvé vide de ses occupants. A la fin de cette même année, le 28 décembre, un charter reliant San Juan de Porto Rico à Miami s'évapore littéralement avec ses 36 passagers.

Le début de l'année 1949 est marqué par la disparition le 14 janvier, d'un cabin-cruiser de 36 pieds, le Driftwoodqui se rendait près de Bimini, aux Bahamas, pour une partie de pêche avec cinq hommes à bord.


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Le PBM Martin Mariner (Dumbo)


Trois jours plus tard, le 17 janvier, un quadri­moteur Tudor IV des British south american air-lines, le Star Arieltransportant un équipage de sept hommes et treize passagers, disparaît au cours d'un vol entre les Bermudes et la Jamaïque.

On ne découvre pas le moindre indice, mais des rapports concernant une «lueur étrange» à la surface de la mer parviennent aux autorités le 18 janvier 1949.

Tel est, assez brièvement exposé, le bilan des drames et des disparitions dans le triangle des Bermudes durant la première moitié du XXe siècle. Notez que, à priori, toutes les autres disparitions recensées (et signalées par les chercheurs) dans la région entre 1938 et 1944 ont été attribuées à des sous-marins allemands ou des pertes militaires lors d'entraînements... idem pour une période 1916-1918...

Sources : "les extra-terrestres et les ovnis dans l'histoire" (1975) de Yves Naud, mise à jour par Yves Herbo et vérifications entre autres sur :

http://www.dinosoria.com/bermudes_triangle.htm, http://www.sur-la-toile.com, Wikipedia, http://www.triangle-bermudes.com/, http://area51blog.wordpress.com/category/les-legendes/le-triangle-des-bermudes/, Le triangle des Bermudes Tome I et II : Sans trace écrit par Berlitz, Charles - Paru en 1986 - Collection/Editeur : J'ai Lu, Le mystere du triangle des bermudes. by Winer R, http://www.thinesclaude.com/tbm-avenger.php....

Yves Herbo Sciences, Fictions, Histoires, 04-2012 (à suivre pour la dernière partie) - up 09-2015

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