mardi 23 juillet 2013

Lévitation et ondes acoustiques : gros progrès

Lévitation et ondes acoustiques : gros progrès

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Transporté par le son

Des chercheurs de l’EPFZ sont parvenus à déplacer des objets à travers les airs grâce à des ondes acoustiques. Le dispositif pourrait être utile pour manipuler des produits biologiques, chimiques ou radioactifs
Il n’y a pas que les saints, bonzes et super-héros américains païens qui s’y connaissent en lévitation. Les physiciens aussi font voler toutes sortes de choses: y compris des insectes, des poissons et des grenouilles. Des chercheurs de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) viennent de franchir une nouvelle étape. Grâce à des ondes sonores, ils arrivent à déplacer des objets à travers les airs. Des gouttelettes de liquide, mais aussi des ­particules solides, des petites boules d’acier et même un cure-dent. Leur dispositif permet de manipuler plusieurs éléments à la fois, voire de les mélanger, sans les toucher. Plusieurs applications sont déjà envisagées. Ces travaux ont été publiés cette semaine dans Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS).

La lévitation n’est pas une branche récente de la physique. Il y a plus d’un siècle, Lord Rayleigh posait les bases de la méthode acoustique. D’autres techniques, comme la lévitation magnétique ou optique, ont déjà fait leurs preuves. « Mais l’approche magnétique est limitée à des matériaux ayant des propri­étés particulières, commente Dimos Poulikakos, un des auteurs de l’étude parue dans PNAS. Quant à la méthode optique, elle ne fonctionne que pour des objets extrêmement petits. » En septembre ­dernier, des chercheurs de l’Argonne National Laboratory, près de Chicago, avaient fait sensation avec leur système acoustique permettant de faire léviter plusieurs gouttes de liquide.

Les ondes sonores sont des variations de pression. Elles exercent une force sur les surfaces qu’elles rencontrent. Si leur intensité est assez élevée, elles peuvent contrebalancer la gravité. Le dispositif classique comprend une plaque vibrante, à laquelle on oppose une autre plaque, qui fait office de réflecteur, ­explique Dimos Poulikakos. L’onde sonore émise par la partie vibrante et sa réflexion se superposent pour créer une onde stationnaire, c’est-à-dire une onde dont certains éléments – appelés nœuds – restent fixes dans le temps. « Sur ces nœuds, la force due à la pression acoustique compense la gravitation. De plus, la pression locale est nulle, alors que ça n’est pas le cas juste en dessous ou en dessus. » C’est ce qui stabilise le système : l’objet se trouvant à cet endroit est comme pris au piège.

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« Mais cela fait plus de cent ans qu’on en est à ce point, poursuit le chercheur. C’est impressionnant, un peu magique, mais pas très utile. Pour la première fois, nous sommes capables de manipuler de manière contrôlée des particules, et de les déplacer à l’intérieur d’un plan. » Au lieu d’une seule plaque vibrante, le système mis au point par les Zu­richois comprend un assemblage de petites plaques de la taille d’un timbre, disposées en damier. Chacune peut être activée et contrôlée séparément. En variant les paramètres de deux plaques voisines, on arrive à faire glisser horizontalement le «piège acoustique» de l’une à l’autre. Et ainsi déplacer l’objet en suspension.

Les chercheurs travaillent à environ 160 décibels – soit bien au-delà de ce qui est supportable par l’oreille humaine –, mais dans les ultrasons, à une fréquence inaudible pour nous. Grâce à leur dispositif, ils ont notamment mélangé «en apesanteur» de l’eau et du sodium, provoquant la brutale réaction qui libère de l’hydrogène. Ils ont aussi inséré de l’ADN dans des cellules. Ou encore préparé de minuscules portions de café instantané.

Dans le Washington Post, Rick ­Weber, de l’Argonne National Laboratory, qui avait fait léviter les gouttelettes, salue l’approche «hautement innovative» des chercheurs de l’EPFZ. Il ajoute que la méthode ouvre beaucoup de nouvelles perspectives pour la lévitation acoustique. Dimos Poulikakos est déjà en discussion avec l’industrie phar­maceutique suisse. Il souligne que le dispositif peut être utile pour la manipulation de toutes sortes d’échantillons, chimiques ou biologiques, en particulier. Notamment lorsque l’on souhaite éviter qu’ils ne soient contaminés par un récipient. Ou alors, pour manier des produits dangereux, chimiques ou radioactifs, par exemple.

« On pourrait penser que le problème majeur est le poids, relève Dimos Poulikakos, mais nous sommes parvenus à faire léviter des petites boules d’acier, qui sont dix fois plus denses que l’eau. Il est beaucoup plus difficile de manipuler des liquides. Si la pression acoustique est trop forte, ils s’évaporent. » Il ne faut pas que la pression dépasse la tension superficielle, cette tendance contractive due à la cohésion des molécules, qui fait que la surface d’un verre d’eau est bombée ou que des insectes peuvent courir sur une marre. Mais le réglage est subtil car, si la pression est trop faible, la goutte tombe.

Hormis le cure-dent, les éléments que les chercheurs zurichois ont déplacé en l’air mesuraient jusqu’à quelques millimètres. Peut-on imaginer passer à des objets plus grands ? Voire expérimenter nous-même un jour les joies de la lévitation acoustique ? « En théorie, il n’y a pas de raison qu’on ne puisse pas aller plus loin, estime Dimos Poulikakos. Mais, dans la pratique, il risque d’y avoir des problèmes techniques.»

par Lucia Sillig http://www.letemps.ch/-22/7/13


Autre Source : http://www.businessinsider.com/sound-can-levitate-an-explosive-reaction-2013-7

SFH-07-2013

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